Contributions sur les hauts revenus : verdict du projet de loi de finances 2025

Contributions sur les hauts revenus : verdict du projet de loi de finances 2025

A l’annonce par le Premier ministre, il y a quelques semaines, de la volonté de mettre en place une contribution qui viserait les plus hauts revenus, beaucoup de fiscalistes (et certains contribuables) ont pu se demander si Michel BARNIER avait connaissance du fait qu’une contribution « exceptionnelle » (CEHR) existait déjà depuis 2012, et en déduire que cette annonce allait simplement se traduire par un durcissement des seuils d’assujettissement (actuellement 250 000 euros pour un contribuable seul et 500 000 euros en cas d’imposition communes) et des taux de cette contribution (actuellement 3% et 4%).

Il fallait toutefois conjuguer cette contribution avec l’ambition de « justice fiscale » affichée, qui est de permettre d’assujettir ces mêmes contribuables à un taux minimum d’imposition de 20% lorsqu’ils ne le sont pas, du fait notamment du pilotage de leur mode de rémunération.

De la même manière que l’IFI sert de variable d’ajustement, à la baisse, grâce à son mécanisme de « plafonnement », pour qu’aucun contribuable n’acquitte un total d’impositions (hors impôts locaux) supérieur à 75% de ses revenus, il eut été possible d’imaginer introduire dans les règles de calcul de la CEHR existante un mécanisme permettant de s’ajuster à la hausse le cas échéant pour permettre d’atteindre le taux minimum souhaité de 20%.

Or, la lecture du projet de loi de finances publié jeudi 10 octobre dernier nous apprend que ce n’est pas l’option retenue par le gouvernement, puisqu’une nouvelle contribution « différentielle » sur les hauts revenus s’ajouterait plutôt à la CEHR pour assurer elle-même cette imposition minimum.

Cette imposition minimum s’apprécierait en proportion du revenu fiscal de référence (RFR), lequel est parfois supérieur à la base sur laquelle l’impôt progressif est calculé.

Les impôts à prendre en compte pour apprécier si le seuil de 20% est atteint ou non, ne tiendraient pas compte des réductions et crédits d’impôt ! Ces derniers étant déjà fortement plafonnés, la contribution différentielle pourrait totalement les priver de caractère incitatif.

Plus surprenant, les « prélèvements sociaux » que sont la CSG et la CRDS ne seraient pas pris en compte pour apprécier le niveau de pression fiscale des contribuables concernés. Or, ces prélèvements (qui n’ouvrent droit à aucune prestation sociale) pèsent de la même manière et voire tout autant que l’impôt sur le revenu.
Ainsi, à titre d’exemple, la pression fiscale pesant sur les dividendes et les plus-values de cession, ainsi que sur certains produits de rachats sur les contrats d’assurance-vie, serait considérée comme n’étant que de 12,80% et 7,50% (i.e. inférieure 20%) alors qu’elle est en réalité de 30% et 24,7% (hors CEHR).

La question se pose par ailleurs de savoir si la nouvelle contribution sera prise en compte pour le calcul de plafonnement de l’IFI (ce qui constitutionnellement parlant, devrait être une exigence) : si tel est le cas, la CDHR sera neutre pour les contribuables qui bénéficient de ce plafonnement puisqu’elle viendrait en déduction de leur impôt sur la fortune immobilière.

Enfin, cette contribution est voulue temporaire, limitée à l’imposition des revenus 2024 à 2026 (3 années) mais il est permis aux contribuables concernés d’ironiser sur le fait qu’elle le soit réellement dans les faits, depuis qu’ils ont constaté que la contribution instituée en 2012, voulue exceptionnelle, est devenue totalement habituelle.

Les débats parlementaires vont peut-être apporter à cette nouvelle CDHR les éclaircissements et corrections qu’elle mérite pour ne pas donner l’impression de dissimuler une réforme durable de la flat-tax et du régime des contrats d’assurance-vie, qui ne s’assume pas. Nous aurons l’occasion d’y revenir au cours des prochaines semaines.

Les avocats de Sevestre & Associés restent à votre disposition pour vous apporter des éclaircissements sur votre situation.